Les Soft Boys sont un des groupes cultes les plus inconnus de l'Univers. Ils l'ont bien cherché, ils étaient au mauvais endroit au mauvais moment. En Angleterre à la fin des seventies, perdus entre débâcle punk et new waves naissantes. Une paire de disques ignorés et clap de fin. Leurs fans les plus célèbres se trouveront de l'autre côté de l'Atlantique. Les Replacements d'abord ... pas de bol, ils n'ont pas eu plus de succès qu'eux et avaient bien du mal à se faire connaître, alors pensez s'il s'est trouvé foule pour s'intéresser à leurs références... Peter Buck de REM ensuite. Là aussi, mauvaise pioche. Buck est un collectionneur de disques maniaque (pléonasme), et il a bien dû citer en interview trois milliards de noms de groupes qu'il trouve géniaux ... pourquoi se souviendrait-on particulièrement des Soft Boys dans cette masse de gens ?
Et que le leader des Soft Boys, Robyn Hitchcock, ait entamé une carrière solo prolixe, sous son nom ou avec son backing band les Egyptians, doit intéresser autant de monde que le prochain disque solo de ... au hasard (enfin presque), Paul Westerberg ...
Pourtant, il suffit d'écouter quelques mesures de « I wanna destroy you » qui ouvre ce « Underwater moonlight » pour se rendre compte que l'on a affaire à des « clients ». Phrasé psychotique rottenien, guitares tranchant dans le gras d'une superbe mélodie, grande chanson de power-pop malsaine ... Une autre ? Pas de problème ... « Kingdom of love » ; chanson à relents psychédéliques avec guitare tournoyant sur elle-même à la « Lucifer Sam » (Hitchcock est fan de Barrett) ... Ou alors « Tonight » qui pourrait se retrouver à la note près sur n'importe quel disque des Replacements ... Ou encore « Old pervert » (Hitchcock a l'art de trouver des titres et aussi des paroles percutants), rêche et martiale, qui annonce PIL ou Killing Joke ... Et puis, tiens, qu'est-ce qu'on pourrait faire avec des entrelacs de Rickenbacker, une mélodie belle à pleurer et des harmonies vocales ? Facile, le petit frère de « So you wanna be a rock'n'roll star » des Byrds, et on appelerait ça « Queen of eyes » ...Ah, y'a aussi un sitar qui traîne par là, eh bien on va en mettre un solo sur un titre, « Positive vibration », qui n'est pas une reprise de Marley mais de la power pop de grande classe ...
Bon, faut pas exagérer non plus, il y a deux-trois titres qui sont pas de ce niveau, et on n'est pas en présence avec ce disque du « Sgt Pepper's » des années punk-new vawe (la place est déjà prise par « London calling »). Mais la diversité et la qualité très au-dessus de la moyenne de « Underwater moonlight » en font un des grands disques oubliés et à redécouvrir de l'époque.
Il existe une réédition sur le label Matador (2 Cds, une multitude de bonus) dont les (rares) aficionados du groupe disent le plus grand bien ...